Après sa pause d’été, Azerty vous invite dans sa presqu’île lexicale pour découvrir d’où vient vraiment le bonnet phrygien, pour vous mesurer à l’art du Fubuki ou pour dompter la tétragone. C'est pas triste.
#38 - Août 2024
👩🏻 Bonjour à tous mes addicts du lexique. Alors que vous devez peut-être concilier suivi assidu des Jeux Paralympiques et course aux fournitures scolaires, Azerty ne quitte pas tout à fait ses quartiers d’été. En tongs encore un peu sableuses, je vous ai concocté un numéro spécial : celui de mes mots de l’été. Une façon de résister malgré tout au tourbillon de la rentrée ?
😎 LE MOT DES VACANCES
Presqu’île
Voilà un mot qui sent bon les vacances, non ? J’avoue avoir un faible pour les îles et pour ce presque. Il s’en est fallu de peu que ce soit une île, avec des horaires de bateau à respecter, mais non, c’est une presqu’île. Une métaphore de notre statut de vacanciers : on va marcher tout au bout pour prendre ses distances, mais on reste malgré tout connectés sur WhatsApp. Il y a aussi dans le mot presqu’île la distinction de l’exception. En effet, la conjonction presque ne s’élide jamais avec une apostrophe devant une voyelle, à une exception près : le mot « presqu’île » ! On écrira donc avec un soupçon de doute : « Léon Marchand est presqueaussi rapide que l’espadon voilier. » Toute la vérité s’étale ici. Si la presqu’île peut nous offrir un certain recul sur la côte principale, ce sont souvent les étrangers qui, avec leurs drôles de questions, nous offrent du recul sur notre langue maternelle. Par exemple : pourquoi dit-on en français « partir aux États-Unis » mais « partir en Allemagne » ? Pour nous, cela vient naturellement, mais il y a bel et bien une règle, comme pour toutes les épreuves des Jeux Olympiques. La voici en cadeau gratuit.
Face à l’engouement pour nos Jeux Olympiques et Paralympiques de Paris 2024, impossible de passer à côté de ce néologisme. Phryge, c’est en effet le nom de la mascotte déjà vendue à plus d’un million d’exemplaires (chiffres exacts encore tenus secrets…). Le mot a bien sûr été formé à partir de l'adjectif existant « phrygien ». Pour frimer lors d’un apéro entre amis devant les épreuves d’escrime fauteuil, vous pouvez réviser attentivement toute l’histoire du bonnet phrygien ici. Cela remonte à des temps bien antérieurs à la Révolution française. Le couvre-chef est en fait d'origine antique anatolienne, plus précisément de Phrygie (un ancien pays d’Asie Mineure, situé sur la partie occidentale de l’actuelle Turquie). Le bonnet phrygien tire même sa symbolique de liberté de sa ressemblance avec le chapeau qui coiffait les esclaves affranchis de l'Empire romain. Ajoutez ensuite que le directeur du design des Jeux Olympiques et Paralympiques 2024 qui a participé à la création des phryges est aussi la personne qui a lancé en 2015 le slogan « Je suis Charlie ». À découvrir en vidéo juste là. En fin d’apéro, vous porterez alors à coup sûr l’estocade.
Anne Debrienne
Plume dans la communication, la créatrice d'Azerty est complètement accro aux mots, des plus modestes aux plus rares... et la passion du lexique, ça se partage.
Avec curiosité et légèreté, c'est encore mieux.
Elle est aussi co-auteure de "C'était Mieux Demain" (Ed. Akiléos), objet littéraire non identifié mêlant fausses réclames et billets d'humeur.
A lire aussi dans AZERTY, la lettre qui nous parle des mots